LA CNAS : LA SOLIDARITE A REBOURS

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C’est quand même étrange que devant la cascade de déclarations des  gestionnaires de la CNAS, à différents niveau qui, par intérêt plutôt que par ignorance, chargent les médecins de la quasi-faillite de la caisse nationale des assurances sociales en raison de leurs prescriptions des arrêts de travail en faveur des salariés malades, ceux dont la mission est de déconstruire le discours officiel, d’analyser, d’expliciter et de réveiller les consciences, reprennent  in-extenso et tel quel lesdites déclarations qui s’assimile à de l’enfumage de l’opinion publique en général et des travailleurs cotisants et de leurs syndicats en particuliers.
L’histoire nous enseigne que c’est sous la poussée des idées conjuguée aux mouvements ouvriers et aux luttes syndicales que le 19ème siècle accouchera laborieusement de législations et d’institutions destinés à garantir la sécurité  de l’homme au nombre desquels figure la sécurité sociale qui est la forme la plus élaborée de protection sociale et dont les caractéristiques essentielles sont la prévoyance obligatoire et le financement par les cotisations des salariés et des patrons.
Et la sécurité sociale algérienne dès l’origine, en 1949, a été un système d’assurances nationales et obligatoires financés par les cotisations des travailleurs et des employeurs, intégrant la protection sociale relative aux accidents de travail, aux assurances sociales, aux retraites et aux allocation familiales, malheureusement réservée quasi-exclusivement à la population européenne avant l’indépendance.
Actuellement, le financement des caisses de sécurité social est toujours assis exclusivement sur des prélèvements à la source sur les salaires des travailleurs. Dès lors, c’est les travailleurs qui paient par anticipation leur consommation de soins futurs des années voire des décennies durant, avant la survenue du risque et combien même ils ne seraient jamais malades ils avancent les frais quand même. Il s’agit d’un prépaiement de soins. C’est comme s’ils font un flexy à un opérateur téléphonique sans même être certain de posséder un Smartphone un jour!
Logiquement, ce mode de financement des assurances sociales par les cotisations des salariés fait de la CNAS une propriété des travailleurs qui en sont les véritables et légitimes actionnaires ! D’ailleurs les caisses de sécurité sociales ne sont pas des administrations publiques mais des organismes de droit privé, dotés de la personnalité morale et de l’autonomie financière et sont réputées commerçantes dans leurs relations avec les tiers comme le stipule le décret n°92-07 du 04 janvier 1992 portant statut juridique des caisses de sécurité sociale.
Donc, les assurances sociales, qui sont présumées réaliser la solidarité professionnelle, sont tenues de garantir aux travailleurs la prise en charge des soins de santé et un revenu de remplacement en cas maladies, d’accident de travail ou de maladie professionnelles ou de maternité en réalisant, par la même, une redistribution horizontale des revenus à travers un transfert entre les biens portant et les malades. Leur vocation fondamentale est d’assurer la prise en charge des cotisants et leurs ayant droits en leurs accordant les prestations en nature et les prestations en espèces comme l’énonce l’article 8 du décret n°92-17 sus cité.
Les prestations en nature sont représentées par le remboursement des actes médicaux, des actes de laboratoire et de radiodiagnostic, les hospitalisations en établissement public ou privés, les actes de chirurgie, les actes de rééducation, les médicaments, etc.
Les prestations en espèces sont représentées par des indemnités journalières correspondant à des revenus de remplacement du salaire durant les périodes d’arrêt de travail pour maladie.
Or que constatons nous depuis plus de trois décennies ? La CNAS qui, indubitablement, n’existe que grâce et par les cotisations prélevés sur les salaires des travailleurs, affiche un mépris total à l’encontre de ces légitimes financeurs en octroyant, dans un premier temps, un remboursement ridiculement bas pour les honoraires des praticiens médicaux libéraux (médecins généralistes et spécialistes, chirurgiens-dentistes, rééducateurs, sages-femmes,  infirmiers, etc.), pour les actes de laboratoire et de radiologies ainsi que pour les hospitalisation dans les structure prives en se référant, hypocritement,  aux tarifs officiels délibérément fossilisés depuis les années 80 et dans un deuxième temps en procédant au déremboursement des médicaments et des arrêts maladie !
Cette stratégie machiavélique de la CNAS contraint les assurés sociaux atteints de maladies graves ou chroniques à supporter sur leur patrimoine les ruineux frais médicaux induits par les examens para-cliniques à l’instar des examens de laboratoires, de radiodiagnostic et d’explorations qui sont, de notoriété publique,  le monopole des structures privées et oblige de plus en plus de patients à recourir à la solidarité familiale ou à la vente de leurs biens quand leur maladie leur commande des soins à l’étranger sinon, fatalement,  à renoncer aux soins, eux qui ont durant toute leur vie professionnelle cotisé jusqu’à 50% de leur salaire brut entre IRG et sécurité sociale.
Mais contrairement à cette avarice dont fait preuve la CNAS à l’égard des salariés, elle fait montre, paradoxalement,  d’une inexplicable générosité envers des catégories sociales qui sont exonérés de cotisations et qui relèveraient, normalement, de la solidarité nationale ou d’une prise en charge par l’Etat ainsi qu’envers d’autres citoyens que leurs fortunes, bien ou mal acquises, leur permettent un accès illimité à toutes les formes de soins ici et à l’étranger.
D’abord, la CNAS assure le bénéfice des prestations en nature aux étudiants, aux moudjahidines, aux handicapés, aux personnes malades ou âgées et inactives pour ne citer que ceux-là.
Ensuite la CNAS assure le financement des établissements public de soins, de manière aveugle, sous forme de forfaits budgétaire, alors que l’accès à ces différentes structures est gratuit pour toutes les personnes vivantes en Algérie y compris les étrangers, les fraudeurs, les barons de l’économie informelle et les barons de la drogue ! De plus dans la composition des budgets hospitaliers, 80% est affectés aux salaires des personnels pléthoriques qui, souvent, sont réduit, pour moult raisons, à faire du secourisme au lieu et place de la médecine !
Enfin, la CNAS assure la prise en charge des soins à l’étranger et verse, chaque année, des millions d’euros aux hôpitaux français, qui comme chacun le sait ne bénéficie pas aux citoyens de deuxième catégorie que sont les salariés !
Incontestablement, Il s’agit d’un détournement des cotisations des salariés qui interpelle les syndicats et peut être les futurs députés de la nation!
Et pourtant ! Est-il besoin d’être prix Nobel en économie pour réaliser qu’une institution comme la CNAS dont le financement est assis sur les cotisations des travailleurs exclusivement ne peut avoir une santé  florissante dans une économie cachectique qui engendre paupérisation et chômage ?
Est-il besoin de démontrer l’évidence que la CNAS est victime de la mal-gouvernance laquelle est responsable de la mise en jachère de tout un pays où l’industrie, l’agriculture et le tourisme sombrent dans le coma et qui, de surcroît, laisse proliférer une économie informelle qui représente 50% du produit intérieur brut (PIB), dont l’essence est la dissimulation du travail et dont l’aboutissement est la phagocytose de l’économie réelle ?
Alors, déclarer que les quelques milliers de dinars engrangés par le déremboursement des arrêts maladies prescrit par les médecins sauvera la CNAS de la faillite c’est prendre les vessies pour des lanternes et, à fortiori, s’enorgueillir de combattre l’absentéisme, qui est un phénomène social complexe qui touche toutes les catégories sociale y compris les députes que le Président de l’APN menace régulièrement de sanction, c’est faire preuve de simplisme et d’impéritie !
Enfin, n’en déplaise à certains bureaucrates et à certains médecins zélés qui réclament en cœur que la foudre de la justice doit s’abattre sur les praticiens médicaux dans l’indifférence des Conseil de l’Ordre – dont la mission principale est la défense de l’honneur de la profession et non la collecte des cotisations- il faudrait rappeler que la relation médecin-malade est basée fondamentalement sur la confiance et quand un patient se plaint d’asthénie et de fatigabilité qu’aucun examen clinique ou para-clinique ne peut objectiver l’étiologie organique ou mentale, le médecin traitant se doit de lui prescrire un arrêt de travail en toute quiétude !
                                              
Docteur KHADIR Mohammed

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