La pseudo-opération "mains propres" : illusion et diversion !

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POURQUOI TEBBOUNE NE POURRA PAS TENIR SES ENGAGEMENTS

Par Ramdane Mohand Achour

Ceux qui sont en âge de le faire se souviennent de la vague d’espoir soulevée en 1992 par les propos de Mohamed Boudiaf contre  la corruption et les corrompus. Ils n’ont pas oublié sa ferme détermination à en venir à bout. Certains n’hésitent d’ailleurs pas à attribuer son assassinat ultérieur à la « maffia politico-financière » qu’il avait dénoncée avec tant de force.
Il serait osé, voire même déplacé, de comparer cette dynamique avortée dans le sang à la présente situation marquée par la volonté annoncée de notre Premier ministre de combattre la corruption. Rien, dans la personnalité, le parcours ou l’engagement politique des deux hommes ne le permet. Il s’avère pourtant indéniable que la dénonciation de  ce fléau par Abdelmadjid Tebboune et ses premiers actes (refus de rencontrer Haddad, mises en demeure adressées à plusieurs entreprises, gel d’attributions douteuses de terres agricoles…) ont provoqué un frémissement certain dans l’opinion publique. Les plus naïfs ont pensé que le Premier ministre allait, avec l’aval du Président Bouteflika, s’attaquer sérieusement à la corruption et enrayer l’inexorable montée en puissance politique d’une oligarchie dont on peut mesurer, aujourd’hui au Venezuela, la forte capacité de nuisance antinationale. Les plus cyniques, qui de guerre lasse ont perdu toutes leurs illusions et parfois toutes leurs convictions, y ont vu à tout le moins l’occasion de décapiter la face la plus hideuse, car visible, de l’iceberg corruption. Tapis dans l’ombre et silencieux, les plus lucides se frottaient les mains devant l’opportunité d’assister à l’élimination de concurrents gênants…
Le vaudeville interprété en direct par Saïd Bouteflika, Ali Haddad et Abdelmadjid Sidi-Saïd lors de la mise en terre de Réda Malek au cimetière d’El Alia a fini, après la rencontre tripartite du matin, par doucher les espoirs de ceux qui pensaient venue l’heure de la chute de la maison Haddad. On ne peut évidemment préjuger de rien dans un pays où, dans la plus pure tradition sicilienne, l’omerta règne en maître. Mais pour beaucoup, l’affaire est entendue. Nous  n’assisterons pas à un remake de la chute de l’aigle Khalifa.
La déception s’avère réelle dans l’opinion publique. Elle l’est à la mesure des espoirs un peu fous placés dans le discours et les actes de Tebboune. Il est vrai que la majorité des Algériens, qui vit dignement, ne supporte pas la corruption et reste attachée à la justice sociale.
Et c’est là que surgit la deuxième promesse du successeur d’Abdelmalek Sellal qui a annoncé solennellement : « Il est hors de question de recourir à l’endettement extérieur, et nous ne voulons même pas y penser. Nous refusons d’hypothéquer notre souveraineté quelle que soit la situation, et ce sont là les instructions du président de la République ». De tels propos ont très certainement déplu à « nos partenaires » du FMI et de la Banque mondiale qui viennent tout récemment encore de réitérer leur éternel et criminel conseil de s’endetter à l’international. Leur lourd silence diplomatique vaut désapprobation. Il n’en va pas de même de leurs relais politiques et médiatiques locaux qui ont crié au scandale. Un article de presse algérois nous instruit sur l’ampleur de la déception des « spécialistes » : « De l’avis de nombreux spécialistes, l’Algérie, accablée par la chute des prix des hydrocarbures, entraînant un déséquilibre budgétaire, une fonte drastique des réserves de change et  un recul considérable de la croissance avec, en prime, un programme ambitieux de transition énergétique et d’une stratégie lourde de relance et de diversification de l’économie nationale, n’avait d’autre choix que d’aller vers l’endettement extérieur. »1
Ainsi, pour les tenants de l’orthodoxie néolibérale, c’est au moment où les caisses de l’Etat sont vides qu’il convient d’emprunter. Une telle attitude s’avère tout à fait compréhensible de leur point de vue politique. Car contrairement à ce qu’ils crient à tue-tête, cette idée absurde n’a rien de « purement économique ». Les néolibéraux les plus acharnés, couche-relais des intérêts étrangers et qui forment, à ce titre, une force compradore, jouent la carte du pire. Impuissants et manquant totalement de courage politique, ils refusent d’affronter le pouvoir. Porteurs d’un projet foncièrement antinational, ils savent ne pas pouvoir compter sur le soutien de la population. Aussi oscillent-ils en permanence entre conseils adressés au pouvoir et attente du « Grand Soir » qui dans leur fantasme revêt la forme de la crise de 1986 qui imposa enfin aux décideurs de prendre des mesures antipopulaires. Le peuple, voilà le  mouton que les néolibéraux ne se lassent pas de voir tondre.
Comme dans le cas de la lute contre la corruption, la déclaration d’intention de Tebboune est bonne. Mais quelle alternative à l’endettement extérieur possède-t-il ? De quelle marge de manœuvre dispose-t-il réellement ? Comment peut-il espérer, dans un contexte de chute du prix des hydrocarbures, ne pas s’endetter à l’international s’il ne parvient pas à mettre un terme à l’évasion fiscale et à la corruption ? S’il ne remet pas en cause les juteuses subventions directes et indirectes généreusement accordées au patronat étranger et intérieur ? S’il n’impose pas un impôt sur la fortune ? S’il ne rompt pas avec la criminelle politique néocoloniale d’importation. Si l’Etat ne joue pas son rôle central dans la relance de l’industrie du pays ? S’il ne fait pas appel à la mobilisation des salariés et des couches moyennes qui sont prêtes à se mobiliser et à se sacrifier pour porter un projet de développement authentiquement national et social ? S’il n’associe pas réellement, c’est-à-dire démocratiquement, les citoyens et leurs organisations syndicales, associatives et politiques à la prise de décision ?

Prisonnier lui-même d’une démarche néolibérale, même si elle s’avère moins extrémiste que celle portée par ses opposants de droite, le gouvernement résistera à la tentation de l’endettement extérieur jusqu’à ce que la situation le contraigne à y recourir. Cette échéance interviendra certainement après avril 2019… C’est là que surgira un Ouyahia, ou l’un de ses clones, qui se chargera avec délice de dépouiller les classes vulnérables de la société.

Celui qui se rêve en Churchill (sic) en finira une bonne fois pour toutes avec le discours de Tebboune selon lequel « l’État dispose de moyens matériels lui permettant de continuer à financer les projets de développement prioritaires, notamment en matière de logement, de santé, d’enseignement, à payer les salaires et à importer à hauteur de 35 milliards de dollars par an. »
Il vaut mieux en être conscient, l’avenir ne s’annonce pas rose pour la majorité des Algériens et pour les catégories laborieuses en premier lieu. La perte d’illusions à propos de la volonté ou de la capacité de Tebboune à mener la vie dure à la corruption et à ne pas abdiquer la souveraineté nationale peut toutefois constituer l’occasion, pour nos concitoyens, de ne compter que sur eux-mêmes et sur les organisations qu’ils se donnent pour rompre avec cette politique mortifère et construire une alternative porteuse de développement indépendant, de justice sociale et de démocratie.
1. Financement de l’économie nationale. L’engagement risqué de Tebboune. Quotidien Liberté 01.08.2017

1 COMMENTAIRE

  1. L’état est tout simplement en faillite
    Il ne peut plus subvenir à ses besoins
    il va escroqué le peuple avec le lancement du nouveau « dinar »
    hyperinflation, retard massif des salaires, etc etc
    Une chose est « positives » …. les services de sécurité (police, gendarmerie, armée, drs) sont archi performants ……
    Dans le rabaissement de la population hyper efficace pour nous « maté »
    Jusqu’à QUAND !!!!!!!!!!

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