L’affaire Si Salah n’a laissé personne indifférent… certaines zones d’ombre planent toujours
El Watan le 02.02.18
Le colonel Salah Zamoum, entre controverses et vérité, tel est le nouveau livre de Djoudi Attoumi. Il décortique l’«autopsie d’un complot». Il tente dans ce livre de dévoiler la vérité sur l’affaire Si Salah. Il s’agit de Salah Zamoum, qui a participé au déclenchement de la Guerre de Libération, puis a été appelé à la Wilaya IV. Il succède au colonel Bougara, tombé au champ d’honneur.
Pour des raisons qu’Attoumi explique dans ce livre, Zamoum rencontre le général de Gaulle et c’est ainsi que l’affaire Si Salah suscitera de nombreuses réactions. Le livre est disponible dans certaines librairies du centre d’Alger. Il est édité par Rym Editions.
– Pourquoi ce livre aujourd’hui ?
Mon projet d’écrire un livre sur le colonel Salah Zamoum ne date pas d’aujourd’hui. En fait, je l’ai entamé en 2006, période à laquelle j’ai commencé à faire des recherches, tant du côté algérien que du côté français. «L’affaire Si Salah» n’a laissé personne indifférent. En Algérie, certaines zones d’ombre planent toujours, plus d’un demi-siècle après. Les gens ont besoin de connaître la vérité.
Des chercheurs se sont accaparés de l’affaire pour aller plus loin sans vraiment y parvenir. En France, des auteurs que j’ai cités dans mon livre ne sont pas de bonne foi. Ils ont tendance à déformer la vérité, des contradictions ont été relevées dans leurs écrits.
Tout en reconnaissant la valeur de l’homme, ils ont tendance à le dévier de sa démarche pour le mener sur un chemin qu’il n’a jamais envisagé. Ils ont donné libre cours à leur imagination pour «faire» de Si Salah quelqu’un qui n’a jamais existé. Vous avez compris que je fais allusion au colonel Jacquin et au capitaine Montagon, qui sont tous les deux auteurs d’écrits sur Si Salah Zamoum.
A leurs yeux, cette affaire était le résultat de l’affaiblissement de l’ALN de par «les coups de bélier» de l’opération «Challe» et «d’une politique d’ouverture» du général de Gaulle qui venait de reconnaître au peuple algérien son droit à l’autodétermination. En fait, il s’agit de paravents qui cachent les véritables intentions des Français sur le destin de l’Algérie, tant auprès des stratèges militaires que du gouvernement français qui tendaient, entre autres, à la création d’une «troisième force», à la partition du pays, etc.
Ce qui m’a aussi poussé à écrire ce livre, c’est que j’ai rencontré le colonel Si Salah au maquis en juin 1960 à la Wilaya III et que j’ai eu l’occasion, à son initiative, d’échanger avec lui des propos sur certains problèmes, comme la fameuse «paix des braves», les négociations de Melun…
J’avais beaucoup d’admiration pour le personnage lorsque je l’ai appris à le connaître. Intelligent avec un sens élevé du patriotisme, il avait un esprit d’analyse objective sur tous les problèmes que vivait notre Révolution. Il paraissait certes préoccupé, mais il ne s’est jamais départi de son engagement de Novembre.
– Vous dites dans votre livre qu’aujourd’hui encore, le sujet est d’actualité car l’affaire si Salah commence à livrer certains de ses secrets, donnez-nous un avant-goût de ce livre ?
La mise au jour de certains éléments a été déterminante dans cette affaire. Il faut dire que du côté des auteurs français, il n’y a pas d’élément nouveau, en dehors du fait que c’est le capitaine Gaston, chef du commando de chasse de Bouira, qui a tué Si Salah et ses compagnons. Il reconnaît avoir refusé d’accepter la thèse de ses chefs hiérarchiques qui ont voulu lui forcer la main pour dire qu’il avait les mains ligotées au moment de sa mort. Bien au contraire, il affirme qu’il avait sur lui son arme, une carabine US, qu’il s’était défendu et que l’arme a été trouvée sur lui.
C’est dire qu’ils ont voulu ternir son image. Il est vrai aussi que le général de Gaulle nous a donné quelques bribes de cette rencontre dans son livre Mémoires d’espoir, en révélant notamment que le comité de la Wilaya IV a sollicité l’autorisation de consulter les 5 prisonniers de la Santé à Paris et de rencontrer les responsables du GPRA à Tunis, ce qu’il avait refusé.
De telles révélations prouvent encore s’il en faut, que l’initiative de Si Salah et de ses adjoints n’avait pas pour but de négocier avec le président français, mais de servir d’intermédiaire entre lui et le GPRA afin d’accélérer la fin d’une guerre cruelle, la fin de ce drame que supportaient difficilement le peuple et les moudjahidine.
Et les nouveaux éléments qui nous ont surtout éclairé proviennent d’abord de l’hommage qui fut rendu au colonel Salah Zamoum en 2009 par la Fondation de la Wilaya IV à l’occasion du 49e anniversaire de sa mort dans le Djurdjura le 21 juillet 1961. Ensuite, ce sont les témoignages en sa faveur de certains de ses compagnons, comme le commandant Lakhdar Bouregaa et le capitaine Mohamed Saiki, qui sont, chacun, auteur d’un ouvrage dont le témoignage est pertinent sur la genèse de l’affaire.
Il y a enfin, le témoignage du cadi de Médéa qui fut l’intermédiaire entre le comité de la Wilaya IV et le gouvernement français en apportant un éclairage important sur le processus, du début jusqu’à la fin. Avec tous ces éléments d’une importance capitale, nous pouvons situer, enfin, les contours de l’affaire Si Salah et les révéler aux lecteurs pour qu’ils la comprennent mieux.
– Vous donnez aussi des détails de l’affaire : la visite à l’Elysée du comité de la Wilaya IV, à sa tête le colonel Salah Zamoum, a suscité bien des questions et des émotions que ce soit du côté de l’ALN ou du côté de l’armée française. Un livre qui créera certainement une polémique…
Il est vrai que l’affaire Si Salah a suscité de nombreuses réactions au sein des parties en conflit, à l’exception du GPRA. Ce dernier n’a jamais commenté cette initiative, se sentant peut-être responsable de n’avoir pas saisi le message du colonel Salah Zamoum adressé en février 1960 à Ferhat Abbas, alors président du GPRA. Je ne pense pas qu’il y aurait matière à polémique autour de ce livre puisqu’il est écrit à partir de témoignages authentiques.
Leur crédibilité ne peut être remise en cause puisqu’ils sont rapportés dans des écrits. Personne ne peut mettre en doute l’honnêteté intellectuelle du commandant Lakhadar Bouregaa et du capitaine Mohamed Saiki, qui étaient de glorieux officiers de l’ALN, sans parler de la prise de position de la Fondation de la Wilaya IV en faveur de Si Salah Zamoum.
– Dans ce livre, des photos exclusives du Congrès de la Soummam, du Colonel Amirouche et d’autres… Il s’agit de vos archives personnelles ou du musée ?
Pour des raisons qu’Attoumi explique dans ce livre, Zamoum rencontre le général de Gaulle et c’est ainsi que l’affaire Si Salah suscitera de nombreuses réactions. Le livre est disponible dans certaines librairies du centre d’Alger. Il est édité par Rym Editions.
– Pourquoi ce livre aujourd’hui ?
Mon projet d’écrire un livre sur le colonel Salah Zamoum ne date pas d’aujourd’hui. En fait, je l’ai entamé en 2006, période à laquelle j’ai commencé à faire des recherches, tant du côté algérien que du côté français. «L’affaire Si Salah» n’a laissé personne indifférent. En Algérie, certaines zones d’ombre planent toujours, plus d’un demi-siècle après. Les gens ont besoin de connaître la vérité.
Des chercheurs se sont accaparés de l’affaire pour aller plus loin sans vraiment y parvenir. En France, des auteurs que j’ai cités dans mon livre ne sont pas de bonne foi. Ils ont tendance à déformer la vérité, des contradictions ont été relevées dans leurs écrits.
Tout en reconnaissant la valeur de l’homme, ils ont tendance à le dévier de sa démarche pour le mener sur un chemin qu’il n’a jamais envisagé. Ils ont donné libre cours à leur imagination pour «faire» de Si Salah quelqu’un qui n’a jamais existé. Vous avez compris que je fais allusion au colonel Jacquin et au capitaine Montagon, qui sont tous les deux auteurs d’écrits sur Si Salah Zamoum.
A leurs yeux, cette affaire était le résultat de l’affaiblissement de l’ALN de par «les coups de bélier» de l’opération «Challe» et «d’une politique d’ouverture» du général de Gaulle qui venait de reconnaître au peuple algérien son droit à l’autodétermination. En fait, il s’agit de paravents qui cachent les véritables intentions des Français sur le destin de l’Algérie, tant auprès des stratèges militaires que du gouvernement français qui tendaient, entre autres, à la création d’une «troisième force», à la partition du pays, etc.
Ce qui m’a aussi poussé à écrire ce livre, c’est que j’ai rencontré le colonel Si Salah au maquis en juin 1960 à la Wilaya III et que j’ai eu l’occasion, à son initiative, d’échanger avec lui des propos sur certains problèmes, comme la fameuse «paix des braves», les négociations de Melun…
J’avais beaucoup d’admiration pour le personnage lorsque je l’ai appris à le connaître. Intelligent avec un sens élevé du patriotisme, il avait un esprit d’analyse objective sur tous les problèmes que vivait notre Révolution. Il paraissait certes préoccupé, mais il ne s’est jamais départi de son engagement de Novembre.
– Vous dites dans votre livre qu’aujourd’hui encore, le sujet est d’actualité car l’affaire si Salah commence à livrer certains de ses secrets, donnez-nous un avant-goût de ce livre ?
La mise au jour de certains éléments a été déterminante dans cette affaire. Il faut dire que du côté des auteurs français, il n’y a pas d’élément nouveau, en dehors du fait que c’est le capitaine Gaston, chef du commando de chasse de Bouira, qui a tué Si Salah et ses compagnons. Il reconnaît avoir refusé d’accepter la thèse de ses chefs hiérarchiques qui ont voulu lui forcer la main pour dire qu’il avait les mains ligotées au moment de sa mort. Bien au contraire, il affirme qu’il avait sur lui son arme, une carabine US, qu’il s’était défendu et que l’arme a été trouvée sur lui.
C’est dire qu’ils ont voulu ternir son image. Il est vrai aussi que le général de Gaulle nous a donné quelques bribes de cette rencontre dans son livre Mémoires d’espoir, en révélant notamment que le comité de la Wilaya IV a sollicité l’autorisation de consulter les 5 prisonniers de la Santé à Paris et de rencontrer les responsables du GPRA à Tunis, ce qu’il avait refusé.
De telles révélations prouvent encore s’il en faut, que l’initiative de Si Salah et de ses adjoints n’avait pas pour but de négocier avec le président français, mais de servir d’intermédiaire entre lui et le GPRA afin d’accélérer la fin d’une guerre cruelle, la fin de ce drame que supportaient difficilement le peuple et les moudjahidine.
Et les nouveaux éléments qui nous ont surtout éclairé proviennent d’abord de l’hommage qui fut rendu au colonel Salah Zamoum en 2009 par la Fondation de la Wilaya IV à l’occasion du 49e anniversaire de sa mort dans le Djurdjura le 21 juillet 1961. Ensuite, ce sont les témoignages en sa faveur de certains de ses compagnons, comme le commandant Lakhdar Bouregaa et le capitaine Mohamed Saiki, qui sont, chacun, auteur d’un ouvrage dont le témoignage est pertinent sur la genèse de l’affaire.
Il y a enfin, le témoignage du cadi de Médéa qui fut l’intermédiaire entre le comité de la Wilaya IV et le gouvernement français en apportant un éclairage important sur le processus, du début jusqu’à la fin. Avec tous ces éléments d’une importance capitale, nous pouvons situer, enfin, les contours de l’affaire Si Salah et les révéler aux lecteurs pour qu’ils la comprennent mieux.
– Vous donnez aussi des détails de l’affaire : la visite à l’Elysée du comité de la Wilaya IV, à sa tête le colonel Salah Zamoum, a suscité bien des questions et des émotions que ce soit du côté de l’ALN ou du côté de l’armée française. Un livre qui créera certainement une polémique…
Il est vrai que l’affaire Si Salah a suscité de nombreuses réactions au sein des parties en conflit, à l’exception du GPRA. Ce dernier n’a jamais commenté cette initiative, se sentant peut-être responsable de n’avoir pas saisi le message du colonel Salah Zamoum adressé en février 1960 à Ferhat Abbas, alors président du GPRA. Je ne pense pas qu’il y aurait matière à polémique autour de ce livre puisqu’il est écrit à partir de témoignages authentiques.
Leur crédibilité ne peut être remise en cause puisqu’ils sont rapportés dans des écrits. Personne ne peut mettre en doute l’honnêteté intellectuelle du commandant Lakhadar Bouregaa et du capitaine Mohamed Saiki, qui étaient de glorieux officiers de l’ALN, sans parler de la prise de position de la Fondation de la Wilaya IV en faveur de Si Salah Zamoum.
– Dans ce livre, des photos exclusives du Congrès de la Soummam, du Colonel Amirouche et d’autres… Il s’agit de vos archives personnelles ou du musée ?
Vous savez que chaque moudjahid détient chez lui des documents et des photos de grande valeur. Tout chercheur se doit de passer par les moudjahidine pour enrichir sa collection afin de les rendre publics. Donc, en plus de mes archives personnelles, je me suis efforcé depuis des années durant à les enrichir par de photos ou de documents où qu’ils se trouvent.
LES DETAILS D’UNE NEGOCIATION
L’affaire Si Salah Zamoum ou Tilsit
https://www.memoria.dz/jan-2014/guerre-liberation/les-details-dune-negociation
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L’affaire Si Salah (1960) : histoire et mémoire (2012)
http://guy.perville.free.fr/spip/article.php3?id_article=284
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Le cinquantième anniversaire de l’affaire Si Salah
Par Ait Benali Boubekeur, 11 juin 2010
http://www.algeria-watch.org/fr/article/hist/affaire_si_salah.htm