Le 23e anniversaire du lâche assassinat de Matoub Lounes.

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Ait Benali Boubekeur

Vingt-trois ans sont passés après l’assassinat de Matoub Lounes, les mêmes questions se posent toujours. Est-ce qu’une enquête impartiale a été mise en place pour élucider le crime ? Est-ce que les inculpés sont réellement les vrais assassins ? Sur ce point, les gens ont le droit de douter, car à chaque fois que l’ENTV se mêle, on pourrait davantage parler d’un montage que d’une quête de vérité. Et enfin, est-ce que les complices sont inquiétés ? Bien entendu, il est difficile de répondre à ces questions, car les zones d’ombres qui entourent, à chaque fois, les assassinats politiques sont légion.

Malgré l’insistance de la famille de Matoub Lounes pour l’ouverture d’une enquête effective, cette demande reste toujours une lettre morte. Et si un jour cette enquête s’ouvre, elle devra tenir compte de tous les éléments.

En fait, trois jours avant l’attentat, qui a couté la vie à Matoub Lounes, les citoyens de la région de Beni Douala ont remarqué des mouvements suspects de quelques personnes armées.

Plus grave encore, vers 11 du matin du 25 juin 1998, des gendarmes de Beni Douala ont intimé l’ordre aux commerçants de fermer leurs boutiques. Pourquoi les témoignages de certains témoins, qui se sont présentés cinq jours après le crime à la brigade de gendarmerie, ne sont même pas enregistrés? Enfin, pourquoi six gendarmes sont-ils mutés une semaine après le crime perfide ? Ce sont donc toutes ces questions qui manquent dans le dossier.

Hélas, à chaque affaire sensible, le régime cherche ses propres témoignages. Et c’est toujours la télévision publique qui joue le sale boulot. En effet, quelque temps après le lâche assassinat, la chaîne publique a diffusé un reportage où des « coupables », se réclamant du GIA, ont avoué le meurtre. Pour les jeunes qui n’ont pas vécu cette période, la télévision publique est la championne des montages dahdouhiens. Bien que ce procédé ne bénéficie d’aucun crédit, la justice algérienne s’est basée exclusivement sur ces témoignages. Ce qui prouve, encore une fois, que la justice est loin d’être autonome. Car, juger un assassinat politique sur la base des témoignages vraisemblablement bien préparés et négliger tous les autres éléments confirme l’absence de justice dans notre pays.

Enfin, le refus de tenir compte du contexte politique de l’année 1998, c’est passer à côté de l’affaire. Car, la Kabylie se préparait à vivre un été politique très chaud. Deux événements allaient augmenter le mercure : la loi sur la généralisation de la langue arabe et la sortie du nouvel album de Matoub Lounes où il a élaboré une version modifiée de l’hymne national. En tout cas, s’il n’y avait pas eu, dans le fond, aucun lien entre les deux sujets, les comploteurs n’auraient pas tardé à établir le lien afin de créer des troubles tels que la loi n’aurait pas pu être adoptée. Quelle est donc la part de vérité des déclarations selon lesquelles des anciens amis de Matoub Lounes auraient vendu la mèche ? Là aussi, comme l’est l’enquête, rien ne permet d’établir la vérité.

Et pourtant, sur d’autres sujets, les mis en cause sont assez bavards, comme c’est le cas sur la « trahison » de l’Émir Abdelkader.

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