ALGÉRIE ENTRE ÉTAT-GARNISON ET ÉTAT-RÉGIME PRÉTORIEN

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Tous les États ont des armées. En Algérie, l’armée a un État.

Depuis son indépendance en 1962, l’Algérie a été confrontée à d’importants défis dans la construction d’un État-nation civil. Cette réalité a donné lieu à un régime politique qui peut être qualifié d’une juxtaposition entre un État-garnison et un État-régime prétorien.

État-garnison : Le pays a été profondément marquée par la guerre de libération contre la France, où l’Armée de Libération Nationale (ALN) a joué un rôle central dans la lutte pour la souveraineté nationale. Après l’indépendance, l’armée est devenue un acteur clé dans la construction de l’État algérien et a maintenu une présence et une influence significatives dans la politique et la gouvernance du pays. Cette influence militaire dans les affaires civiles est qualifiée d’État-garnison.

État-régime prétorien : L’Algérie a également connu des périodes où l’armée a joué un rôle plus direct et prépondérant dans la politique et la gouvernance, caractéristique d’un État-régime prétorien. Le coup d’État militaire de janvier 1992 a marqué une période où l’armée a pris le contrôle du pouvoir politique, annulant les élections législatives et plongeant le pays dans une période de violence et d’instabilité.

Cette combinaison d’un État-garnison et d’un État-régime prétorien a eu des conséquences néfastes sur la gouvernance et la stabilité politique en Algérie. L’armée a exercé un contrôle sans scrupules sur les affaires politiques, économiques et sécuritaires du pays, aux dépens des institutions civiles et de la démocratie.

Dans un texte prémonitoire de Mohammed Hachemaoui (1) chercheur algérien au Centre Maurice Halbwachs, où il décrit la trajectoire postcoloniale algérienne comme une « révolution » qui a connu tour à tour le « Parti-État », le « péril islamiste », une « guerre civile » puis une « autocratie », la « crise » de cette dernière précipitant un « soulèvement populaire » provoquant la chute du « raïs » et imposant une « transition ».

En rupture avec la doxa, cette étude établit que la domination politique, issue de la contre-révolution prétorienne des années 1950, s’appuie sur un complexe État-régime prétorien.

La séquence historique qui s’ouvre avec le coup d’État militaire de janvier 1992 est moins une « guerre civile » qu’une violente néo-libéralisation prétorienne, nécessitant la réinvention de la tradition de l’État-garnison comme « crime organisé ».

Tirant un « enseignement stratégique » du succès de la gigantesque mobilisation orchestrée par la police politique égyptienne contre le président élu Morsi en 2013, la puissante police secrète algérienne orchestre, canalise et encadre les manifestations de rue anti-Bouteflika V.

Sous une apparente radicalité, ledit Hirak contribue à figer le statu quo autoritaire : anti-politique, il opère un évitement structurel des conflits qui travaillent la domination néo-prétorienne et néolibérale. Célébrant la fraternité avec l’armée, cette contre-révolution pacifique achève de renforcer la « mise en cage » du peuple algérien.

Cette analyse qui bat une brèche dans les approches circonstanciées à la question algérienne aborde de manière critique la trajectoire politique de l’Algérie postcoloniale et propose une perspective différente de celle généralement acceptée. Voici un exposé des principaux points pertinents à cette lecture :

Révolution, État-garnison et État-régime prétorien : Le texte remet en question le récit dominant qui qualifie la trajectoire algérienne de « révolution ». Au lieu de cela, il propose que la domination politique en Algérie découle d’une contre-révolution prétorienne des années 1950. Cette contre-révolution fut initiée par l’assassinat de Abane Ramdane, acte fondateur qui plaça l’aile militaire aux commandes du pays depuis la période coloniale. Ainsi, l’État-régime prétorien devint la base de cette domination politique, donnant aux militaires une influence sans limite sur les affaires civiles et politiques du pays.

La séquence historique depuis 1992 : Le texte remet en question l’idée d’une « guerre civile » en Algérie après le coup d’État militaire de janvier 1992. Au lieu de cela, il présente cette période comme une néo-libéralisation violente prétorienne, où les militaires ont joué un rôle déterminant dans les décisions économiques et politiques du pays.

Le rôle de la police politique : Le texte souligne le rôle de la puissante police secrète algérienne dans l’encadrement et la canalisation des manifestations de rue anti-Bouteflika V. Il suggère que cette action contribue à figer le statu quo autoritaire en évitant de confronter les conflits sous-jacents liés à la domination néo-prétorienne et néolibérale.

Le Hirak et ses limites : Le Hirak, le mouvement de protestation algérien, est présenté comme « antipolitique » et ne remettrait pas en question la domination en place. Il est même qualifié de contre-révolution pacifique, renforçant ainsi la « mise en cage » du peuple et entretenant une fraternité factice avec l’armée plutôt que de défier son autorité.

Il est important de noter que le texte propose une analyse critique dans laquelle les différentes perspectives sur la politique algérienne convergent toutes pour reconnaître le rôle central de l’armée dans la gestion du pays. Bien que la situation politique en Algérie soit complexe et ouverte à différentes interprétations, l’élément militaire est défini comme une caractéristique structurelle.

Sans concession, cette analyse remet en question le récit dominant et met en lumière le rôle prépondérant de la caste militariste du régime et de sa police politique dans la gouvernance et la domination politique du pays.

Tant que la situation de répression, corruption, inégalités socio-économiques et isolement international perdure en Algérie, l’avenir du pays sera entravé. Ces problèmes, qui découlent des caractéristiques de l’État-garnison et de l’État-régime prétorien en vigueur, continuent de peser lourdement sur la nation algérienne et représentent des obstacles majeurs à la construction d’une société prospère et équilibrée.

Khaled Boulaziz

(1) https://fasopo.org/sites/default/files/varia2_n51.pdf

1 COMMENTAIRE

  1. Bien comprendre l’origine du sujet ; colonisés par l ‘esprit colonisateur Francais et revanchard! nous ont apportés infectés et surtout apprit la violence, rappeler vous la décapitation de Louis16, depuis toujours la France a connue la violence jusqu’au dernier roi Philip, Notre peuple avaient un niveau intellectuel assez élevé avant l’arrivé des francais chez nous, avec les othmans les gens furent plus civilisés, automatiquement la violence amène la violence, les ben m hidi les ben boulaid paix a leurs âme ont combatus aussi les colons, on est donc victime des délinquants voir analphabètes qui ont prit le pouvoir eux même sont de victime , vue l ‘histoire n attendez rien dans les médias pour restaurer le pays, c ‘est une chaine de délinquance datant de plus de 200ans….

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