12 Février, 2020 9:37
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Lynda Abbou
Il y a un an, le mardi 12 février 2019, une manifestation hostile au 5e mandat de Bouteflika est organisée dans la wilaya de Chlef (205 km de la capitale), par quelques dizaines de personnes. A partir de cette ville, le slogan « Bouteflika, yal merouki, makeche ohda khamsa», ( Bouteflika, le marocain, il n’y a pas de 5e mandat) a été lancé pour la première fois. Personne ne savait que cette action allait changer le destin de l’Algérie et faire boule de neige pour donner naissance à la révolution du 22 février 2019.
Cette manifestation est intervenue après deux « provocations » majeures du pouvoir. La première est l’organisation du meeting de la Coupole du 5 juillet, à Alger, pour annoncer officiellement la candidature de Abdelaziz Bouteflika pour un 5e mandat, animé par ce qu’on appelle l’alliance présidentielle, le 09 février 2019. La deuxième est la déclaration de Ahmed Ouyahia, Premier ministre de l’époque, qui avait dit à la presse, le 11 février 2019, que le peuple algérien était heureux de la candidature de Bouteflika.
Tout est parti ensuite d’une petite rue de Chlef et d’une petite vidéo publiée sur les réseaux sociaux. « Makeche Ohda Khamsa », (il n’y aura pas de 5e mandat) deviendra le slogan des millions d’Algériens aux quatre coins du pays, et fera chuter Bouteflika !
Le 14 février 2019, le jour de la saint- valentin, et par amour pour leur pays, des d’habitants de la wilaya d’Annaba ont organisé un sit-in contre la candidature de Bouteflika. Le cour de la révolution a accueilli ce jour-là une centaine de protestataires.
Téléphone en main, le jeune Chems Eddine Lalami, dit Brahim, filme la marche qu’il avait organisée avec un petit groupe de jeunes à la wilaya de Bordj Bou Arreridj le vendredi 15 février 2019. Ils ont défié la peur et ont répondu à Ouyahia en disant que le peuple algérien n’était pas « content ». Ils ont scandé très fort « had chaâb la yourid, Boutefflika w’Said », (ce peuple ne veut ni Bouteflika ni Said). C’est un autre slogan qui résonnera dans toute l’Algérie, jusqu’à la chute des deux frères qui détenaient le pouvoir, le président et son conseiller.
Brahim Lalami ne se contentera pas lors de cette manifestation des slogans hostiles à Bouteflika et Ouyahia, il visera le changement du système et dénoncera Tliba, Ghoul, Ben Younes et tous ceux qui plaident pour la continuité du régime et qui défendent la « momie ».
Le jeune homme incarcéré aujourd’hui pour son activisme au Hirak, avait mis l’accent sur ce qui deviendra le point fort de la révolution en cours, c’est l’aspect pacifique des manifestations. « La tadmir, la takssir, nahno norido ataghyir », (pas de destruction pas de casse, nous voulons uniquement le changement) scandait Brahim et ses amis ce jour-là.
Après les deux premières petites manifestations à Chlef et à Bordj Bou Arreridj, la première grande foule manifeste à Kherrata, dans la wilaya de Béjaia, le samedi 16 février 2019, contre le 5e mandat du président déchu Abdelaziz Bouteflika et contre le pouvoir en place. Plusieurs centaines de personnes de tous les âges ont marché avec des drapeaux noirs et ont scandé des slogans hostiles aux dirigeants du pays tel : « Y’en a marre de ce pouvoir ». Ils étaient munis de pancartes et des banderoles sur lesquelles on pouvait lire : « je suis Algérien, je suis contre le 5e mandat », « pouvoir assassin » ou encore « le mandat de la honte ».
Ainsi, la mobilisation commençait à prendre de l’ampleur, les Algériens affichaient de plus en plus leur rejet du 5e mandat, et les influenceurs commençaient à appeler à un soulèvement populaire. Les dates 22, 23 et 24 février ont commencé à faire le tour des réseaux sociaux, c’est celle du vendredi 22 février 2019 qui va être retenue par des artistes et activistes, malgré l’anonymat de la 1e source de la proposition de cette date.
Après Chlef à l’ouest et Bejaia au centre, arrive le tour de la wilaya de Khenchla à l’est du pays. Le mardi 19 février 2019, Un poster géant du candidat-président Bouteflika a été décroché de la façade de la mairie et piétiné par une foule de manifestants à Khenchela. « Nehi teswira o kheli laâlam », (enlève la photo et laisse le drapeau), c’est ainsi que les habitants de Khenchla ont rompu avec le règne de Bouteflika.
Cette action était une réponse à un message provoquant posté la veille par le maire de la ville Kamel Hachouf qui s’est opposé à la visite de Rachid Nekkaz. Les manifestants se sont rendus au siège de la mairie et ont scandé « Nekkaz Président ! », « Non au 5e mandat ».
Le vendredi 22 février 2019, des dizaines, des centaines, des milliers puis des millions d’algériens, des hommes et des femmes de tous les âges, de toutes les tendances et idéologies et de toutes les régions d’Algérie, ont pris leur destin en main. Ils veulent « un changement radical » du régime.
Un an exactement nous sépare de la première étincelle qui a allumé la révolution de l’espoir, et qui bouclera dans dix jours, sa première année …
A cet excellent article et rappels de Lynda Abbou, je voudrais vous faire partager ce message que j’ai reçu d’un ami facebooker, car après cette formidable mobilisation qui a conduit à la révolution citoyenne, il faut quand même commencer à se poser la bonne question : « Que faire maintenant ». Cet article ci-après vient nous proposer une option. Je cite:
« Chers compatriotes démocrates progressistes
Aujourd’hui, je me plais à vous faire part d’une partie d’une contribution de Djaffar Lakhdari (Membre du Collectif de la société civile pour une transition démocratique), qui a été publié sur Magreb Emergent ce 12 février 2020. A vous d’en juger, d’être d’accord ou pas d’accord ! Mais si «pas d’accord» dire, si possible, ce qu’il faut faire à la place ou qu’elle est votre proposition. Il faut clairement se déterminer, se positionner, on a perdu trop de temps contrairement à ce qui nous prêche à longueur de débat ….« chi va piano va sano»
….
… « Le Hirak est un mouvement citoyen pacifique et déterminé. Ce qu’il exprime par ses manifestations qui durent depuis bientôt un an (fait unique au monde par son ampleur et sa durée), mais aussi par son refus d’engager d’autres formes d’action telles que la grève générale, c’est sa volonté d’obtenir la sortie du système par une voie pacifique c’est-à-dire par la réforme et la négociation.Dès lors la question : faut-il négocier ? Devrait plutôt être posée sous la forme, que doit-on négocier, comment, quand, avec qui et sous quelles conditions ?
Toutes questions qui peuvent trouver des réponses appropriées dès lors qu’est clairement rappelé et acté le point officiellement admis par le pouvoir et réclamé par le Hirak, la pleine et exclusive souveraineté populaire (qu’expriment les slogans « Etat civil » et « indépendance »). Souveraineté populaire sans laquelle il n’y a pas de souveraineté nationale, comme l’a montré la révolte contre le cinquième mandat qui a vu le peuple seul, s’opposer à cette forfaiture et sauver le pays.
Les diverses composantes de la société civile, collectifs, associations, partis, syndicats… travaillent aujourd’hui à réunir une large coalition des forces en phase avec le Hirak pour, au sein d’un Congrès National, poser les termes précis de ce changement. Cette démarche apportera la réponse à la question des conditions et termes de la négociation à venir.
Ceux qui aujourd’hui acceptent de partir en ordre dispersé « négocier », ne servent ni les intérêts du pays, ni les projets de leurs mouvements à supposer qu’ils en aient.
C’est l’intérêt de tous les Algériens, sans exclusive aucune, qu’une telle démarche aboutisse afin de reconstruire des institutions, aujourd’hui en ruine, sur une base démocratique. L’Histoire montre que la stabilité et la pérennité d’un Etat ont pour seuls fondements des institutions légitimes.
Négocier demain signifiera-t-il quitter le domaine de la protestation populaire ? Non bien sûr car c’est la mobilisation populaire qui est le moteur du changement.
Lutter comme si on ne négociait pas, négocier comme si on ne luttait pas, sera ainsi le leitmotiv classique d’une telle démarche.
La politique dit-on, est l’art du possible. On peut lui préférer la posture du rejet de tout compromis, posture non dénuée d’un certain panache. Mais dans ce cas on est dans un autre registre.»
Fin de citation
@Bettache
Si je peux émettre un avis et me permettre de répondre à la question de votre amis » Que faire maintenant? » je dirais qu’on ne doit rien faire avant la LIBÉRATION DE TOUS LES DÉTENUS, NE POINT Y PENSER AU DIALOGUE AVEC CEUX QUI CONTINUENT D’INCARCÉRER ARBITRAIREMENT DES CITOYENS DIGNES QUI DEMANDE UN ETAT DE DROIT ET une justice independante.
il ajoute « Faut-il négocier ? Devrait plutôt être posée sous la forme, que doit-on négocier, comment, quand, avec qui et sous quelles conditions ? ».Ne pensez vous pas que votre ami brule les étapes, comme ceux qui ont deja osé prendre contact avec le pouvoir en place. C’est bien de se projeter dans l’avenir mais pas en passant sur le corps de ceux qui moisissent dans les geôles du gang. Revenons au présent et dite à votre ami de se mettre dans la peau d’un TABOU d’un BOUMALA et de tous ces patriotes qui se sont engagé à fond dans le Hirak au détrimlent de leurs vies privés en sacrifiant familles et professions.
Que pensent ils d’un tel discours et pensez vous qu’ils n’ont pas des visions en ce sens.
Nous sommes en plein révolution, débarrassons nous du « mal » , le reste se fera automatiquement des qu’il yaura les prémices d’un état de droit. Hélas jusau’a maintenant il n’ya aucun signe d’apaisement ou de volonté réel de changement.
Donc à mon humble avis le combat continu et qui à dit que le Hirak rejette la Gréve generale , toutes les options pacifiques sont encore en vigeurs dont la grêve et autres , à la guerre comme à la guerre. Quand le peuple jugera le moment opportun, ca se déclenchera automatiquement et sans préparation . Cap sur la date anniverssaire et la réponse du peuple….
Cher@Dria, dans le texte il n’y pas le terme dialogue, mais « négociation » ! Il y a une grande différence ! Quand on négocie on vient avec des exigences. Et ensuite la négociation veut dire aussi exiger la libération des détenus politiques et d’opinion, la libération des médias etc.. etc.. Il ne faut pas laisser le hirak ne compter que sur les marches, c’est dangereux pour son avenir car le pouvoir çà ne le dérange pas du tout de le voir marcher, la preuve : le hirak marche depuis une année et le pouvoir applique sa feuille de route entre temps en toute tranquillité !Il faut que le hirak passe à une autre forme de combat, il fait qu’il fasse sa propre auto organisation, qu’il développe encore plus ses initiatives locales ou nationales, rédige sa propre feuille de route consensuelle, accepte d’avoir ses propres délégués ou porte parole élus ou désignés au sein de la société civile pour défendre ses revendications face au pouvoir, et qu’il pense à s’auto organiser pour devenir une forte unie d’opposition et de proposition ! 30 millions de hirakiens ne peuvent pas se mettre à table face au pouvoir, c’est IMPOSSIBLE.
Excellente rétrospective sur la naissance et le cheminement de la révolte des algériens contre le système néocolonial hérité de la colonisation Française et installé par le pouvoir militaire depuis le premier coup de force contre l’assemblée constituante en 1963 et la démission de son président Ferhat Abbas. Depuis cette date, le peuple algérien est toujours en recherche de sa souveraineté usurpé par un clan qui installe des présidents de façade.
Le mouvement populaire a permis de reconcilier l’algérien avec lui-même, de se regarder en face, de dire des vérités, de faire tomber les tabous sur l’exercice du vrai pouvoir et l’immonde corruption qui sevi en Algérie, corruption matérielle et corruption de l’âme.
Beuacoup d’algérien n’ont découvert l’Algérie qu’après le 22 février 2019. Auparavent ils raisonnaient Houma, arch, région, intérêt personnel ou diha lelouad.
2019 a permis de découvrir comment un pouvoir qui possede une rente peut utiliser cette dernière non pour le bien de la société, mais pour corrompre l’âme de la société, détruire sa moralité, dans le but de la maintenir sous saa domination.
2019 a permis de découvrir comment des personnalités peuvent vendre leur âme au diable pour sauvegarder des privilèges bassement matériel. Les Algériens seront traumatisés pendant longtemps par les déclarations chocantes et unanimes des militants des partis FLN, RND, TAJ, MPA dont notamment Bouchareb, Ouyahia, Ould Abbas, Ghoul, Saidani, etc…
2019 a permis heureusement de découvrir le génie, le courage, la détermination et le pacifisme des algériens qui ne veulent que vivre en paie et exercice leur souveraineté sur leurs institutions et leurs richesses.
Le chemin pour le changement que veulent les algériens sera long et dificile et nécitera beaucoup de sacrifices car il remet en question les privilèges exorbitants des différentes clientèles du système.