ALI LA POINTE, SES FRÈRES ET SES SŒURS

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“ Ils n’étaient pas nés pour être des héros ou des martyrs. Mais si c’est être un héros que de se lever quand il faudrait rester couché, de se révolter contre la force brutale, de refuser l’humiliation et d’entrer dans l’arène, les mains nues face à l’injustice, alors ils ont mérité ce titre. Mais si c’est être un martyr que de savoir souffrir et mourir pour que d’autres connaissent la joie de la liberté, alors ils ont mérité ce titre.”

Le 08 Octobre 1957, il y a de cela 63 ans jour pour jour, les officiers parachutistes du 1er REP du sinistre Bigeard sous les ordres du commandant Guiraud, adjoint du colonel Jeanpierre, dynamitèrent le refuge au 5 rue des Abdérames en Haute Casbah, où se cachaient Ali la pointe, Hassiba Ben Bouali et le petit Omar.

Le souffle de l’explosion fut d’une telle puissance, que les immeubles voisins furent détruits totalement. On dénombra 23 martyrs, la plupart des enfants

Conséquemment après leur forfait, on se glorifia dans les états-majors et les cabinets ministériels de l’issue de la “bataille” d’Alger. On n’y souffla mot de Hassiba qui avait dix-sept ans et était si jolie, ni du petit Omar dont les yeux noisette riaient tout le temps.

Nous reproduisons ici les noms de ces martyrs pour que nulle n’oublie :

Bouhamidi Mahmoud – 18 ans
Yacef Omar – 13 ans
Amar Ali – 27 ans
Hassiba Ben Bouali – 17 ans
Cherifi Mohamed – 27 ans
Cherifi Rabiaa – 3 ans et demi
Cherifi Safia – 2 ans et demi
Ismail Zahia – 4 ans
Ismail Naima – 01 an et demi
Ghressi Belkheir – 52 ans
Ghressi Kheira – 38 ans
Ghressi Cherifa – 07 ans
Ghressi Ali – 16 ans
Gherissi Mohamed – 12 ans
Gherissi Abdelkader – 09 ans
Ghressi Said – 4 ans
Hajj Karama – 63 ans
Karama Aisha – 63 ans
Ben Ammar Ashura – 17 ans
Merabat Fatima – 46 ans
Cherifi Yamina – 18 ans
Cherifi Ali -16 ans
Cherifi Bayia – 14 ans
Cherifi Boualem – 9 ans

Le massacre, il ne peut avoir d’autre nom, de la rue des Abdérames, c’est le triomphe de l’arbitraire, c’est la cruauté sans partage, c’est la pitié oubliée et bafouée, c’est la sauvagerie brutale, c’est l’appétit effréné du sang et de la mort d’une puissance coloniale en plein déclin.

Si le récit de ce massacre et la vue de ces ruines nous donnent encore aujourd’hui une indicible nausée, c’est parce que nous savons intimement, au creux de nos tripes, au cœur de notre conscience que ce qui se produisit ce jour-là est exactement ce que les Algériens et Algériennes, l’Histoire de de cette terres, ses héros ont toujours voulu combattre.

Leur martyre concentre tous ce qui révulse, et qui révolte l’âme humaine. Il attente à des hommes, à des femmes, à des enfants mais il attente aussi à la conscience universelle. C’est tout ce contre quoi nous avons combattu depuis la nuit des temps: la violence arbitraire au nom d’un idéal raciste.

Notre conscience ici s’insurge parce qu’a été piétiné ce qui nous construit en profondeur, le respect de la vie humaine. Nous ne serions pas le peuple que nous sommes si nous ne donnions à l’autre un statut sacré. C’est parce que nous lui conférons cette dignité suprême que nous devons honorer chaque fois le mémoire de nos martyrs.

L’Algérie est ce pays où depuis des siècles, un peuple aspire à la vie, au droit, à la justice, à la dignité avec une volonté et une abnégation qui défient le temps.

Cet effort parfois échoue. L’Histoire en déjoue les intentions.

Mais le combat continue car nous sommes chez nous. Nous ne pouvons aller ailleurs. C’est cette terre qui a nourri nos ancêtres, c’est cette terre qui nourrira nos enfants. Libres ou esclaves, elle nous appartient, nous lui appartenons et elle ne voudra pas nous laisser périr. L’Algérie ne peut vivre sans nous. Nous ne pouvons vivre sans elle. Ce sont les Algériens qui ont fixé, il y a quatorze siècles, le destin de l’Algérie.

Ce destin ne pourra jamais s’accomplir sans nous.

C’est notre sermon à nos martyrs.

Meriem Eldjouzi (Petite-Fille de Madame Merabat Fatima)
Khaled Boulaziz

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