Algérie : « Le pouvoir bafoue au grand jour les traités internationaux qu’il a ratifiés »

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mardi 29 juin 2021
lemonde.fr

Le mathématicien Pierre Audin et l’architecte Samir Yahiaoui déplorent, dans une tribune au « Monde », que l’ONU n’ait pas pris acte de « l’état déplorable des droits humains » dans le pays.

Tribune.

Quelque 10 000 arrestations – dont plus de 6 300 ces quatre derniers mois –, 300 détenus d’opinion, 700 procès, une dizaine de plaintes pour viols et tortures pendant les gardes à vue… C’est le bilan, forcément provisoire, établi à ce jour par la Ligue algérienne pour la défense des droits humains (LADDH) et le Comité national pour la libération des détenus (CNLD).

Ses critiques du régime auront même coûté son poste à un magistrat, radié par ses pairs fin mai. La répression est désormais la seule réponse du régime en place depuis 1962 au mouvement citoyen pacifique du Hirak, débuté le 22 février 2019 pour réclamer ni plus ni moins qu’un Etat de droit.

Ce bilan répressif ne suffit pas au pouvoir algérien. Il l’assortit d’un discours conspirationniste, considérant les millions de marcheurs tantôt comme des idiots utiles, tantôt comme les supplétifs d’un vaste plan de subversion du pays conduit par une triple alliance Marocco-israélo-française ! Dans cet objectif, deux documentaires, produits par le service de communication et d’orientation de l’armée et diffusés par la télévision d’Etat, développent ad nauseam cette élucubration, à grand renfort d’images de raids israéliens sur Gaza et d’« analyses » d’experts maison.

Le pouvoir en place en Algérie a d’ailleurs élargi le concept de « terrorisme » pour y englober le simple fait d’appeler à un changement de régime. En vertu de cette extension, tout citoyen appelant à la fin du régime risque désormais de voir son nom inscrit sur une liste nationale de terroristes et d’être traité comme tel.

Fin de non-recevoir

Face à de telles outrances, pas moins de 82 organisations algériennes et internationales, dont la LADDH, Amnesty International, Human Rights Watch, Reporters sans frontières (RSF) et MENA Rights Group, ont tenu, avec une rare unanimité, à interpeller le Conseil des droits de l’homme de l’ONU sur les dérives d’un pays membre : l’Algérie, dont le pouvoir bafoue au grand jour les traités internationaux de protection des droits humains et contre la torture qu’il a paraphés et ratifiés et dont la Constitution affirme que les traités internationaux ont la primauté sur le droit national.

Les détenus et leurs proches, qui représentent toutes les couches de la société algérienne, chômeurs et étudiants, journalistes et avocats, universitaires, médecins, blogueurs, caricaturistes ou syndicalistes, ont attendu avec grand espoir que la 47e session du Conseil de droits de l’homme prenne publiquement acte de l’état déplorable des droits humains dans leur pays. Cet espoir a été déçu : la résolution finale ne fait nulle mention du cas algérien, alors même que l’Algérie n’a rien à envier aux régimes condamnés et dénoncés par le conseil lors de sa 47e session. La démarche des 82 ONG aurait-elle fait l’objet d’une fin de non-recevoir ? Et si oui, pourquoi ?

Le Parlement européen avait dénoncé la répression à laquelle sont livrés les militants qui ont fait le choix résolu de protester pacifiquement. Les Algériennes et les Algériens devront-ils attendre la 48e session pour voir le régime algérien condamné par le Conseil des droits de l’homme, ou ce dernier va-t-il continuer d’ignorer leurs souffrances ?

Pierre Audin est mathématicien, fils de Josette et Maurice Audin (militant indépendantiste assassiné en 1957) ; Samir Yahiaoui est architecte et militant politique.

1 COMMENTAIRE

  1. L’etat catastrophique actuel de l’Algérie est dû à l’erreur de jugement monumentale qu’a commise Houari Boumediene en injectant du poison-les DAF- dans le corps de l’Armee Nationale Populaire. Depuis son assassinat (empoisonné selon Bencherif- un de ses proches), ce poison a élu domicile au cœur du Pouvoir. Maintenant, tous les membres, tous les organes et toutes leurs fonctions sont à sa merci. Nous avons attendu qu’il s’effondre sous la pression populaire combinée à l’usure de son fond de roulement et il a effectivement atteint ce stade si la conjoncture internationale ne l’a sauvé in extremis: Covid-19, ce canular aussi grotesque, mais plus restrictif que celui du 11 septembre accomode tous les gouvernements sous contrôle de la franmaçonnerie et les gouvernements fantoches qu’ils imposent aux peuples opprimés. Alors, l’alibi étant de nature globale, la résistance doit être de nature globale aussi. Tout terrain, où qu’il soit, une fois acquis aux forces du mal sera définitivement « passifié » et utilisé comme tremplin pour conquérir d’autres espaces.Et donc toute résistance, où qu’elle se manifeste restricte le déploiement de cette dictature mondiale.

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