L’étau se resserre sur les médias algériens

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Après une période de relative ouverture qui a suivi le large mouvement populaire enclenché en février 2019, les médias algériens sont à nouveau sous pression. Entre censure et arrestations.

MÉDIAS > ALI CHIBANI > 8 NOVEMBRE 2019

https://orientxxi.info/

18 mars 2019. — Manifestation des journalistes de la télévision publique devant les locaux de l’ENTV(image vidéo postérisée)

La commémoration du 65e anniversaire du déclenchement de la guerre d’indépendance en Algérie a coïncidé avec le 37e vendredi du Hirak (le Mouvement). Alors qu’une marée humaine traversait les rues de la capitale où les Algériens s’étaient donné rendez-vous, bien des médias ignoraient complètement l’événement.

Pourtant, quelques jours après le début de la contestation le 22 février 2019, on pouvait suivre la mobilisation contre le régime sur tous les médias, qu’ils soient privés ou publics. Même l’Entreprise nationale de télévision (ENTV)1 a pris l’habitude de poser ses caméras sur les toits pour filmer de loin. « On montrait les manifestations, bien que la manière de le faire soit restée fidèle à l’esprit de l’ENTV », précise le journaliste Abdelmadjid Benkaci.

LE LEURRE DE L’OUVERTURE

L’ENTV enrobe toute information dans un apparat nationaliste. Pendant la retransmission des manifestations avec un micro d’ambiance au plus bas afin que les slogans hostiles au pouvoir soient inaudibles, les présentateurs étaient en pâmoison devant le pacifisme du peuple qui, s’émeuvaient-ils, exprimait son amour pour son pays. Lyrique, pathétique et surtout absurde, la couverture des manifestations a vite été arrêtée. Même scénario au sein des chaînes privées : les directs en plein défilé ont brutalement disparu, remplacés par des commentateurs prorégime prônant une solution par la voie électorale.

Un événement majeur a forcé les médias audiovisuels à changer de position. « Alors qu’une réunion secrète a lieu à Alger entre le général Toufik, le général Tartag et Saïd Bouteflika pour préparer l’annonce de la destitution du vice-ministre de la défense, Gaïd Salah a eu vent de la réunion, se souvient Saïd Boudour, journaliste arrêté quelques jours après notre entretien. Des véhicules banalisés de l’armée ont alors encerclé toutes les chaînes afin de les empêcher de transmettre cette annonce. Après cela, elles ont été autorisées à couvrir les manifestations pour légitimer l’intervention de Gaïd Salah qui a forcé Abdelaziz Bouteflika à démissionner. Cet objectif atteint, elles ont cessé de couvrir les marches. »

Ali Fodil, dirigeant de la chaîne Echourouk TV qui continuait à couvrir les manifestations a même été arrêté par les services de renseignement. À sa sortie des locaux de la police, il a remercié l’armée de l’avoir libéré. Sa chaîne est rentrée dans le rang ; Fodil est décédé quelques mois plus tard d’un arrêt cardiaque.

ALLAH POUR FAIRE DIVERSION

Le vendredi après-midi, pendant que des millions de personnes marchent, les chaînes de télévision optent pour un bouquet de programmes religieux, de documentaires créationnistes et quelques débats sur l’importance des prochaines élections. On peut entendre la star d’Ennahar TV, Cheikh Chemsou, qui répond à la question existentielle d’un téléspectateur : « Ma femme me dit d’aller vivre chez son père et de subvenir à leurs besoins. Que puis-je faire ? »

Sur la chaîne islamiste Al-Bilad, un candidat à la prochaine présidentielle annonce que « les rêves seront les réalités de demain pour le peuple algérien, avec l’aide de Dieu ». Dans son JT du vendredi 25 novembre, l’ENTV consacre trois documents à la visite du président par intérim Abdelkader Bensalah au 18e sommet des Non-Alignés à Bakou, offrant au public l’intégralité de son discours qui dure 13 minutes. « C’est absurde ! s’exclame Benkaci. On diffuse des informations qui n’intéressent personne. On participe à un processus contre-révolutionnaire. C’est comme si on revenait à l’ère du parti unique. »

En Algérie, l’information a toujours été liée à la lutte politique. Elle a d’abord été un privilège du colonisateur, avant que des médias algériens n’apparaissent parallèlement à l’émergence du mouvement nationaliste. L’indépendance acquise, l’État exerce vite son monopole sur l’information2. Les journalistes sont alors sommés par Houari Boumediène de choisir entre soutenir ou trahir la Révolution.

L’ouverture qui suit la révolte d’octobre 1988 concerne le secteur de la presse, avec l’apparition de nombreux journaux. Mais le monopole de l’État ne disparait pas. C’est lui qui distribue la manne publicitaire dont il fait, non un droit, mais une récompense, comme le prouve la décision de Bouteflika de priver de publicité les médias qui ne soutenaient pas sa candidature pour un quatrième mandat en 2014. C’est le cas du quotidien Liberté qui a dû augmenter son prix de vente pour survivre.

LE SURGISSEMENT DU PRIVÉ

L’apparition des chaînes de télévision privées est toute récente. Le journaliste Tarik Hafid s’en souvient : « Dans le sillage des Printemps arabes, l’État algérien a autorisé la création de chaînes privées. Le régime les a maintenant récupérées afin de contrebalancer la circulation de l’information sur les réseaux sociaux. » Ces médias appartiennent à des oligarques, dont certains, comme Ali Haddad et Mahieddine Tahkout sont en prison pour corruption.

Expliquant le comportement non professionnel des télés privées, Saïd Boudour dit : « Bouteflika a autorisé la création de chaînes à capitaux étrangers par ses proches. Officiellement, ce sont des chaînes étrangères. Pour cela, elles ont leur siège à l’étranger et leurs bureaux en Algérie. L’État accorde à leur personnel des accréditations de trois ans pour mieux les contrôler. Dans le chaos d’un secteur sans textes réglementaires et où les salaires sont très faibles, la ligne rouge à ne pas dépasser est vite intégrée. »

Tarik Hafid souligne le premier rôle assigné à ces médias : « Ils sont chargés de diffuser les informations “glauques’’ et populistes que l’ENTV ne peut pas passer pour garder l’image d’un service public sérieux. À titre d’exemple, en 2014, une chaîne privée a accusé Ali Benflis, rival d’Abdelaziz Bouteflika à l’élection présidentielle, d’avoir constitué un groupe terroriste et d’avoir introduit des armes à partir de la Libye. C’est le genre de manipulations que l’ENTV ne se permet pas. »

EFFACER LA MÉMOIRE DU HIRAK

La censure est une pratique ouvertement louée par le pouvoir algérien. Face aux manifestations, le général Gaïd Salah a incité les « médias patriotiques » à « contribuer activement à la victoire de l’Algérie contre ses ennemis ». Le ministre de la communication Hassan Rabehi a appelé les journalistes à « aller dans le sens des efforts des institutions nationales et des corps de sécurité, en matière de défense de l’image et des intérêts du pays ».

Face à une telle pression et dans l’incertitude de ce que sera l’avenir, les journalistes réagissent avec prudence. Aussi les résistances sont-elles le fait de quelques individualités qui peinent à peser dans les choix de leur direction.

« Nous avons créé le Collectif des professionnels de l’audiovisuel de l’ENTV et avons organisé des sit-in de protestation pendant 17 semaines, témoigne Benkaci de l’ENTV. Mais le mouvement s’est essoufflé à cause de la démobilisation. Certains ont été promus, d’autres ont peur de perdre leur emploi ou d’être arrêtés. »

À la radio aussi, seuls « quelques journalistes ont conscience du rôle qui devrait être celui du service public », confie Saïd B. qui nous apprend que sa profession répond à un cahier des charges défini dans les années 1980. Saïd B. dénonce « l’excès de zèle des responsables et des sous-fifres qui verrouillent l’information pour avoir des promotions. Nacera Cherid, directrice générale de la radio nationale3, donne quelques instructions qui sont librement interprétées par nos responsables. Si les journalistes de la Chaîne 3 [francophone] se sont émancipés, la Chaîne 1 [arabophone] et la Chaîne 2 [berbérophone] n’ont toujours pas compris qu’on doit être au service du public et non au service de l’État. »

Le personnel de la radio publique a diffusé un communiqué où il dénonce la censure qui, selon Saïd B., est allée crescendo : « Au début des manifs, nous pouvions tout rapporter. Puis, on a commencé à nous interdire la diffusion des slogans populaires. Quant aux collègues qui font toujours leur travail honnêtement, ils sont censurés au moment de la diffusion. C’est le cas d’un journaliste de la 2 qui avait laissé un enregistrement sonore de 35 à 40 secondes dans lequel s’exprimaient plusieurs manifestants. Il ne restait plus que 10 à 15 secondes à sa publication. Nos responsables agissent comme s’ils voulaient effacer la mémoire du Hirak pendant qu’il se produit. »

L’ancienne DG a été remplacée par Djamel Sanhadri, sous-directeur de programmation à la radio Chaîne 3, au moment où Nassim Aziri, ancien rédacteur en chef à l’ENTV était nommé à la tête de la Chaîne 3. Les deux hommes, connus pour être des soutiens inconditionnels du régime, semblent avoir pris à cœur leur mission de cadenasser la liberté d’expression des journalistes. Leur première cible est la Chaîne 3 où « Actuel », une émission hebdomadaire de débats politiques, a été suspendue sans préavis. Nous apprenons aussi qu’une journaliste a été écartée de la présentation du flash info affectée à la production.

DES JOURNALISTES ARRÊTÉS

La gestion de ces éveilleurs de conscience professionnelle par les autorités et par leur direction varie. Benkaci a été sanctionné d’un avertissement et d’une retenue sur salaire. À la radio, les compétences du « noyau dur » sont marginalisées par leur affectation à des tâches techniques loin de leur mission journalistique ou programmées à des horaires de travail qui ne leur permettent pas de se rencontrer.

La censure peut s’exercer avec plus de brutalité. Plusieurs journalistes ont été arrêtés, voire enlevés, avant d’être relâchés. Saïd Boudour est toujours en détention pour ses articles et ses écrits sur le net. D’après Tiziri Latifa, la pression sur les journalistes ne date pas de cette année : « En 2014 déjà, j’ai senti une énorme pression à travers des menaces contre les journalistes. Certes, la une est restée un peu punchline, mais l’information n’est plus aussi critique. » Cette journaliste observe qu’un certain nombre de collègues d’El Watan, d’El Khabar et d’autres titres indépendants ont choisi de se retirer.

La même journaliste juge que son métier n’a pas évolué depuis les années 1990. « On ne propose pas un format utile, pratique, fonctionnel pour un lectorat en demande quotidienne d’information. Les gens ne veulent plus des unes lugubres. Ils veulent un traitement intelligent de la politique, ils ont besoin de lire des enquêtes, de trouver des réponses à leurs questions sur leur santé… »

« Nous nous focalisons sur le factuel, car l’actualité est très riche, rétorque Souhila Hamdane, journaliste à Liberté où elle ne subit aucune pression. Il nous arrive d’avoir jusqu’à une dizaine d’informations capitales en une journée. Malgré tout, Liberté publie quotidiennement des articles commentant et analysant les événements. Quand vous dites que l’Algérie souffre d’un déficit en journalistes d’investigation, je ne suis pas d’accord. Le problème n’est pas dans la compétence des journalistes, mais dans la rétention d’information érigée en règle à tous les niveaux. »

« Le seul effet du contrôle des médias, regrette Tarik Hafid, est qu’on entend les foules scander qu’Al-Magharibia est la chaîne du peuple, ce qui est grave puisqu’il s’agit d’une chaîne propagandiste proche du FIS4 et fondée par le fils d’Abassi Madani. »

« INSTALLEZ UN VPN »

Les deux seules chaînes qui tirent leur épingle du jeu sont Berbère Télévision et Al-Magharibia. Média français accessible par abonnement, Berbère TV couvre sans censure les manifestations en Kabylie et dans d’autres villes du pays. Al-Magharibia est une entreprise de droit britannique financée par le Qatar. Animée en grande partie par des survivants du FIS et leurs alliés, elle partage des vidéos réalisées et envoyées par des spectateurs vivant en Algérie.

Apaisées ou hargneuses, habiles ou creuses, les émissions d’Al-Magharibia sont généralement de longs échanges improvisés par les présentateurs, dont le rappeur Lotfi Double Kanon. Les invités donnent leur avis sur le plateau ou via l’outil de communication en vidéo Skype. Les intervenants sont de tous les bords politiques — même du Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD) — tant qu’ils ne s’opposent pas franchement au retour du FIS. Leur parole n’est pas censurée, pendant que les manifestants islamistes sont valorisés et que des extraits de discours d’Abassi Madani sont diffusés après ceux d’Aït Ahmed et d’Abdelhamid Mehri qui furent contre l’interruption du processus législatif de 1991.

Car la stratégie de la chaîne est celle de tous les islamistes algériens. Elle passe d’abord par le refus d’être étiquetés « islamistes » pour se dire « conservateurs ». Elle suppose aussi l’affichage d’une certaine ouverture d’esprit aux points de vue divergents. Enfin, elle veut brasser large, tant dans les communautés linguistiques que dans les classes sociales, afin de se laisser porter par un mouvement d’opposition global qui cible l’ennemi commun qu’est le pouvoir militaire.

Mais sa diffusion a été brutalement interrompue par l’opérateur Eutelsat qui, contacté, se refuse à tout commentaire quand un animateur de la chaîne interrogé par El Watan explique (16 octobre 2019) : « Eutelsat nous a informés par courrier que l’État algérien leur avait demandé de mettre fin à la diffusion d’Al-Magharebia. »

Si l’accusation était vraie, ce ne serait pas la première fois que l’État algérien empêche la circulation de l’information. Les médias en ligne en ont été les premières victimes. Leur accès a longtemps été impossible dans le pays. Le site Tout sur l’Algérie (TSA) a pendant plusieurs semaines averti sur sa page Facebook : « TSA est censuré en Algérie par le pouvoir. Pour nous lire, installez un VPN5 . »

L’autoritarisme du régime algérien ne s’arrête pas là. Les syndicats sont aussi visés, d’après le journaliste et militant des droits humains Saïd Boudour : « Notre première assemblée générale pour créer le Syndicat des éditeurs de presse électronique a été empêchée par la police qui a exigé l’autorisation du préfet pour nous réunir. Aucune loi n’impose une telle autorisation pour une réunion syndicale. Et si on la demandait, la réponse serait négative. » Les seuls syndicats tolérés sont ceux qui ne s’occupent, comme à l’ENTV, que des revendications matérielles et jamais de la ligne éditoriale.

Malgré cela, Benkaci reste optimiste : « Je pense que l’ouverture aura lieu d’ici la fin de l’année, qu’il y ait des élections ou pas. Il faut garder espoir, surtout si le Hirak continue dans la même dynamique. »

ALI CHIBANIÉcrivain et journaliste. Cofondateur du blog littéraire La Plume francophone. Auteur de Tahar Djaout et Lounis Aït Menguellet. 

3 Commentaires

  1. le hirak donnera certainement naissance a des medias plus emancipes et plus credibles….la liberté de l information comme l independance de la justice ou l autonomie des institutions s arrachent par la determination de la revendication populaire ! il ne faut pas s attendre a ce que ce soit les journalistes fonctionnaires qui « libereront la presse » comme ABDOU BENZIANE ALLAH YERAHMOU ou Fodil boumala…l emergence de l elite de l information emergera par besoin! quand on voit le professeur rezzagui et ses discourts il y a des raisons d esperer que le pays n est pas pourvu exclusivement de cahiristes il y a de la bonne graine elle emergera in chaa allah…..

  2. Farid
    13 novembre 2019 – 22 h 04 min
    Nous assistons depuis plusieurs mois à un face à face entre la population et le pouvoir profond où le rôle du Chef d’État-major semble décisif. Ce n’est pas une surprise. Le papier publié en 2014 (le-complot-de-sid-kaci-06-avril-2014.html), soit bien avant la chute des prix du pétrole comprend des paragraphes prophétiques: la baisse des prix du pétrole, les futurs rôles de certains acteurs. Ce papier soutenait qu’il existe un complot visant à détruire la nation algérienne. Tout est dit dès le premier paragraphe : «A mon avis, l’objectif de ceux qui nous dirigent est de terminer leur mission qui consiste à détruire la nation algérienne».
    En 2016, un autre article a précisé que le 5eme mandat n’était pas le véritable enjeu (ce-que-prepare-chakib-khelil-ii.html): « Il faut comprendre que malgré les apparences, l’enjeu actuel n’est pas la succession, c’est le maintien de l’exécution de la feuille de route avec, à la clef, la privatisation du secteur des hydrocarbures. »
    A cet effet, le retour de Chakib Khelil (le-retour-annonce-de-chakib-khelil-iv.html) pour relancer le projet de loi sur les hydrocarbures était incontournable. Mais finalement, craignant les conséquences d’une très forte aversion populaire pour cet américain, le système a opté pour son lieutenant Ould Kaddour. Le régime n’a pris aucun gant pour le nommer à la tête de Sonatrach. Ould Kaddour a accompli sa mission. La loi sur les hydrocarbures est sur le point d’être votée. Après Chakib Khelil, c’est au tour d’Ould Kaddour d’être ex filtré après avoir dilapidé plusieurs milliards de dollars en moins de deux ans, alors que de jeunes porteurs de drapeaux sont mis en prison.

    Le pouvoir profond ne se sent pas menacé par la perspective d’effondrement à moyen terme des réserves de change. Pour lui, la menace du chaos poussera tous les acteurs à adhérer au projet de la loi sur les hydrocarbures qui prévoit le développement des ressources de gaz de schiste. Mais le temps presse car la baisse des prix du pétrole est venue créer une situation nouvelle qui bouscule à la fois le financement de la campagne d’endormissement du peuple et la rémunération des agents d’exécution du régime.
    Plusieurs personnalités estiment que ce n’est pas le moment de lancer un débat et une réflexion sur le modèle énergétique algérien. Malti s’interroge (https://algeria-watch.org/?p=72689) sur le timing du vote concernant le projet de loi sur les hydrocarbures dont les retombées portent sur le long terme. Il écrit : « Ils veulent donner l’illusion au peuple – et probablement à eux-mêmes – que le pays va bien, que l’argent (va) rentrer dans les caisses de l’État ».
    Cette explication semble plausible au premier regard. A travers son adhésion au projet de loi sur les hydrocarbures rédigé à Washington, le pouvoir de l’ombre confirme son allégeance à la feuille de route de ses parrains étrangers. Il attend deux retombées principales du vote de cette loi : (i) le soutien des puissances occidentales après des élections présidentielles truquées (ii) l’octroi d’un financement qui assurera la paix sociale pendant quelques années et fera croire au peuple que la menace de la faillite financière sera repoussée jusqu’en 2030 avec l’arrivée du gaz de schiste et pourquoi pas, la privatisation de Sonatrach.
    Par ailleurs, le pouvoir délivre deux importants messages d’allégeance du vassal à son suzerain : il n’inquiète ni Chakib Khelil, ni Ould Kaddour et il siffle la fin de la récréation pour les oligarques algériens. Seules les grosses firmes privées étrangères accompagnées de leurs banques seront autorisées sur le marché de l’import-import.
    Et dire que sous le règne de Bouteflika, l’Algérie avait les moyens d’asseoir les piliers d’un nouveau modèle économique en mesure d’assurer une transition énergétique cohérente et une diversification de l’économie qui aurait pu donner la priorité à la promotion d’une politique agricole vertueuse. On aurait pu aspirer à une croissance économique durable au lieu et place d’un PIB indexé sur les revenus des hydrocarbures. Mais, hélas, on est dans une conjoncture plus grave que celle d’octobre 1988 car ce n’est plus une affaire de baisse de prix du pétrole. L’Algérie va subir dans les dix prochaines années les retombées d’une situation planifiée de « Peak Gas » qui pourrait réduire en peau de chagrin les exportations d’hydrocarbures.
    En fait, la situation actuelle est le résultat de plus de vingt ans de manœuvres politiques, de clientélisme et d’alliances contre nature qui ont permis de saboter toute l’économie du pays. Le régime maffieux a finalement réussi à construire un système politique propice au développement d’une économie de bazar. Le système est convaincu qu’il pourra garder le pouvoir en méprisant son peuple et en privant la femme algérienne des droits qui lui permettront de participer de manière active et responsable à la croissance de l’économie algérienne.

    Dans ce papier consacré au sabordage de notre pays, il est important de citer Benbouzid et les frères Hadjar, ces baathistes à qui le pouvoir de l’ombre a confié une mission essentielle, celle d’effacer l’identité berbère ancestrale et de saboter le système éducatif. On retrouve aujourd’hui, sans surprise, cette constance au niveau de la lutte contre notre identité berbère. Au lieu de développer l’enseignement des langues pour perpétuer notre culture et accéder au savoir universel, ces baathistes, qui envoient leurs enfants étudier à l’étranger avec des bourses d’état, ont tout fait pour dégrader le niveau de l’école et de l’université algériennes. Tahar Hadjar, ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique a récemment déclaré : « En quoi ça m’avance moi, si on a un prix Nobel issu de l’Université d’Alger? ». Faut-il en déduire que le régime a nommé cet âne pour couler l’université algérienne, une approche que l’on retrouve d’ailleurs dans plusieurs secteurs qu’on cherche à démanteler?

    Les conséquences du sabotage de l’éducation et de la mauvaise formation de notre jeunesse sont dévastatrices. La jeunesse algérienne diplômée ou non, avec ou sans expérience, est confrontée au chômage. Au lieu de créer des emplois, les milliards de dollars injectés dans des mégaprojets ont drainé des milliers d’ouvriers étrangers, notamment des chinois. Se sentant trahis par leurs aînés, de jeunes algériens désespérés optent pour la barque suicidaire ou l’immolation par le feu.
    Avant l’avènement du Hirak, le pouvoir algérien de l’ombre était convaincu qu’il a réussi à s’affranchir de la peur des émeutes. Dans les moments de rentes abondantes, l’Etat rentier a eu le loisir et les moyens financiers permettant de coopter les différents segments de la société à l’approche des élections. Les jeunes ont eu droit à travers l’Ansej à des crédits à des taux bonifiés. Cette politique a provoqué une floraison de micro-entreprises très précaires. Quand la manne des hydrocarbures a commencé à se tarir, le régime a raréfié les crédits destinés aux jeunes et s’est mis à réclamer le remboursement des prêts.
    Les jeunes n’ont connu que les quatre mandats de Bouteflika. Beaucoup ne l’ont jamais entendu parler et gardent de lui l’image d’un homme très malade, incapable de diriger un pays. L’annonce de sa candidature à un cinquième mandat a créé un déclic salutaire au niveau de cette jeunesse qui exprimait depuis 2016 sa colère dans les stades et au niveau des réseaux sociaux (https://www.youtube.com/watch?v=9yBIj7c-p58&feature=youtu.be).

    La crise financière représente aujourd’hui une menace pour l’omerta dans la mesure où elle fragilise la discipline au sein des rangs des exécutants mafieux. On assiste à une guéguerre autour du partage du gâteau de l’import-import. Des enjeux importants semblent menacés puisque des chefs de gouvernement, des ministres, des oligarques et des généraux sont incarcérés. C’est une situation inédite en Algérie.
    Les masques sont tombés. Il est devenu clair, pour les parrains du régime, que la feuille de route initiale n’est plus applicable et qu’un passage en force, avec violence si nécessaire, est devenu incontournable. Terreur, provocation, humiliation et propagande sont devenues les outils préférés d’une cabale dont les tentacules ont investi massivement tous les moyens modernes d’endoctrinement et de contrôle de l’opinion publique. Les lois sont bafouées quotidiennement par un appareil judiciaire majoritairement à la botte de l’exécutif. Les postes sont attribués à des personnes sans mérites, voire même à des repris de justice, une autre forme de provocation pour humilier les citoyens. Qu’ils soient artistes, journalistes, blogueurs, écrivains, civils ou militaires, tous ceux qui lèvent la tête et rejettent le discours officiel sont embastillés sans jugement.

    Bouteflika très malade ne peut pas terminer la mission qui lui a été confiée par ses parrains. Il est inquiétant de constater que ceux qui ont investi pendant vingt ans pour liquider la nation algérienne ne vont pas renoncer alors qu’ils sont si près du but. Ils vont nous sortir un nouveau président non-élu et faire croire au peuple algérien qu’il va combattre les maux de l’Algérie.
    Les invariants de la feuille de route exécutée par le pouvoir profond reflète une stratégie de long terme développée par des groupes d’intérêts étrangers visant à mettre la main sur le domaine minier algérien. Ces groupes semblent privilégier un passage en force avec un mépris manifeste pour le peuple. Ils ont pris les commandes opérationnelles en Algérie à travers quelques exécutants galonnés rémunérés par la corruption. Ces « galonnés » qui composent la « Issaba » exécutent un plan extrêmement sophistiqué et bénéficient de moyens de renseignement très importants. Il faut se demander si le futur de l’Algérie n’est pas déjà écrit dans le cadre de l’initiative du «Grand Moyen Orient » divulgué en 2003.

    S’il est clair qu’il existe un complot contre l’Algérie et qu’on prépare la privatisation du secteur des hydrocarbures, Il ne faut pas perdre de vue que cet objectif a d’autres conséquences:
    • La sécurisation militaire par les forces de l’OTAN des futurs investissements de BP, Total et EXXON en Algérie. Rappelons qu’Ould Kaddour en tant que PDG de BRC, société algéro-américaine, a construit la première base militaire US.
    • L’installation au pouvoir d’un régime qui va poursuivre l’œuvre de dégradation et d’asservissement de la société algérienne, à travers notamment la destruction de l’école et de l’université.

    La mission des traîtres qui exécutent cette feuille de route est pratiquement achevée. Après les élections, le régime achètera la paix sociale pour encore deux à cinq ans, jusqu’à l’endettement profond de l’Algérie.
    Que restera-t-il de l’Algérie après l’épuisement des réserves de change et le transfert des réserves d’hydrocarbures à des parrains étrangers ? Un pays avec un peuple docile qui accepte les conditions du FMI (thèses de Chakib Khelil) ou un pays livré au pillage et à une guerre civile qui justifiera l’intervention militaire des nations de l’OTAN qui ont déjà pris position autour de nos frontières (Tunisie, Libye, Tchad, Mali, Maroc..).
    N’est-il pas trop tard pour offrir les services de la base de Mers El kébir à la flotte russe en espérant bénéficier en retour-comme en Syrie- du parapluie russe face à l’encerclement militaire à nos frontières terrestres ?

    Que peut-on faire ?
    Le défi majeur de l’Algérie, c’est l’instauration d’une démocratie véritable et le recours à un modèle économique qui nous permettrait de gérer l’après-pétrole. C’est l’œuvre d’au moins une génération. Les recommandations en ce sens relèvent du bon sens: il faut récupérer l’école et former des ressources humaines compétentes, rétablir la justice, promouvoir notre potentiel agricole, encourager le développement d’industries stratégiques et des services créateurs d’emplois et de valeurs ajoutées et surtout, redonner l’espoir à nos jeunes. Mais pour que tout cela se réalise sans violence, il y a un prix à payer que le peuple va exiger avant d’accepter de se serrer la ceinture: il faut lui rendre justice en faisant la lumière sur tous les scandales et les actes de corruption et de trahison du clan au pouvoir et de leurs complices. Les crimes de corruption sont imprescriptibles et régis par des accords internationaux. Il faudra juger et condamner ces criminels pour pouvoir saisir leurs biens.
    Je recommande de créer un tribunal révolutionnaire dont la mission serait d’enquêter sur les crimes économiques, d’identifier les traîtres à la nation et de récupérer les milliards de dollars qui ont été détournés. C’est la seule et unique recette pour éviter dans 2 ou 3 ans la guerre civile programmée par la feuille de route du GMEI dont l’objectif reste « la sécurisation militaire » des futures installations d’EXXON, BP et TOTAL.

    • @Farid

      Tout a fait d’accords. Le diagnostic est connu de tous, idem pour les responsables. Ces traîtres à la nation, qui continuent de nous narguer, car nous n’osons pas. Alors avant de penser au tribunal révolutionnaire et sa mission, il faudrait d »abord se débarrasser de ce pouvoir, d’éliminer le gang des généraux qui vacillent depuis le 22 février et qui nous entraîne inéluctablement vers une guerre civile malgré notre bonne volonté et notre pacifisme, ils veulent nous embourber pour nous entraîner dans la violence un certain 12 Décembre.

      Je vais oser dans cet écrit pour faire entendre ma voix; Une voix que beaucoup d’algériens partagent certainement, mais qui n’arrivent pas à se faire entendre. La surdité n’est pas l’apanage de nos seuls dirigeants, on retrouve hélas parmi nous des sourds et des aveugles , qui par couardise, qui par opportunisme mais surtout par peur. La peur de perdre le peu de confort qu’ils ont entre leurs mains; la peur de voir la situation empirer s’ils suivaient leurs consciences et leur bon sens, en ces moments de doute.

      Alors, moi Dria, je vais oser de faire un appel. A défaut d’un conseil de la révolution, à défaut de représentants du Hirak, à défaut d’un compromis politique que l’opposition n’a pu concrétiser à ce jour, à défaut d’une élite capable de traduire les pensées par des actes sur le terrain, à défaut de porte-paroles du mouvement populaire, a défaut de réussir des actions communes en dehors des marches de mardi et vendredi.

      Je me vois dans l’obligation de prendre la parole et de faire un appel aux algériens et algériennes surtout après l’approbation des deux chambres sur la loi des hydrocarbures. Du moment qu’on ne peut avoir un Appel Unanime et solidaire, alors à l’instar du soldat inconnu, je fais l’appel en tant que citoyen inconnu,je fait appel à toutes ces figures qui œuvrent activement ou passivement , de vives voix ou clandestinement à tout(te)s ces patriotes qui attendent avec impatience l’ultime action pacifique une escalade en réponse à toutes ces humiliations et injustices qui alimentent la haine et la colère du peuple.

      Je tente par cette démarche personnelle,l’intérêt générale d’après mon humble avis, je ne pourrais mener cette action seul, donc je demande un soutien aux noms qui suivent afin de coordonner pour réussir une action pacifique qu’on doit mener tous ensemble.Je me permet de citer vos noms car vous avez un poids dans le Hirak. Je fais appel Dr S.E.Sidhoum, H.Addi, M.Bouchouchi, M.L.Rahmani, H.lalmas, N.Belhimer, I.Lakhdara, M.Benchikou, A.Belhadj, A.Mellah… (je me contente de cette dizaine, je pourrais atteindre une centaine et j’ai choisi volontairement que des hommes, non pas par misogynie mais pour être plus opérationnelle, sans oublier tous les détenus qui méritent tous d’être citer)

      Soyons uni dans l’action a entreprendre comme un seul homme, l’ Algérie est en danger le sort de la nation est de notre responsabilité tous.

      Un ultime appel pour une escalade pacifique ; une GRÉVE GÉNÉRALE de 48 HEURE à partir de SAMEDI et DIMANCHE pour ne pas piétiner sur les MARDI et VENDREDI une grève pacifique de tous les secteurs Economiques et de tous les paliers de l’education et des universités, des banques port et aéroports , des désagréments et un sacrifice indispensable afin de paralyser le pays et mettre à nu le « gang des généraux » et surtout pour ne pas sombrer dans la violence vers laquelle les nostalgiques du système et la mafia au pouvoir tente de nous emmener un certain 12 décembre

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