65 ANS DE L’HERITAGE DU GPRA : UNE EPOPEE DE LIBERTE ET UN DESTIN EMPECHE

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Le Gouvernement Provisoire de la République Algérienne, tel un phare dans la Guerre d’Algérie pour l’Indépendance (1954-1962), émergea de la longue nuit coloniale, porté par le Front de Libération Nationale Algérien (FLN). Sa naissance, au Caire, Égypte, le 19 septembre 1958, fut un éclat de lumière, quatre ans après que le conflit ait pris son envol.

Ferhat Abbas, ce nationaliste au cœur modéré, qui avait longtemps prôné la voie politique face à un système colonialiste français génocidaire, avait finalement cédé à la désillusion pour se joindre à la lutte armée du FLN. Il fut le premier président de ce gouvernement en exil, élu en 1960. Pourtant, dès l’année suivante, son étoile pâlissait, laissant place à Benyoucef Benkhedda, qui présidera lorsque l’Algérie accédera enfin à l’indépendance.

Le GPRA, telle une plume délicate portée par les vents diplomatiques, se dressa comme un ambassadeur et un instrument politique pour le FLN. Les gouvernements bienveillants lui offrirent une reconnaissance officielle, parmi lesquels le Maroc voisin, la Tunisie, l’Égypte nassérienne, d’autres pays arabes et le Pakistan. Il élut son quartier général à Tunis, mais ses diplomates s’étaient disséminés dans les grandes capitales du monde, nouant des liens, en portant la voix du peuple algérien dans les arènes mondiales. C’était aussi une réponse préemptive à l’idée de Charles de Gaulle d’organiser un référendum donnant à l’Algérie un statut autonome au sein de la France.

Après la guerre, une crise secoua l’Algérie, et des conflits internes divisèrent le FLN. Benkhedda régna brièvement à Tizi Ouzou, mais l’unité manquait à la nation. C’est alors qu’Ahmed Ben Bella, accompagné de l’Armée des Frontières firent leur entrée en scène, établissant leur fief à Tlemcen en juillet. Le 9 septembre, ils pénétrèrent à Alger, et Ben Bella déclara que la crise était enfin derrière eux. Fin 1962, le GPRA s’éteignit, détrôné par Ahmed Ben Bella, qui créa une institution rivale, soutenu par le clan d’Oujda dirigé par le Colonel Houari Boumédiène. Les politiciens du GPRA et les unités de guérilla loyalistes tentèrent en vain de résister dans un déchaînement de combats intérieurs brefs mais intenses. Un compromis forcé par Boumédiène intégra la plupart du gouvernement provisoire dans un Bureau Politique élargi, et le GPRA s’évanouit. Un État à parti unique, sous la férule de Ben Bella, prit alors forme, après l’approbation d’une constitution lors d’élections où 99,6 % des électeurs approuvèrent la nouvelle république.

Cette crise a brisé la continuité institutionnelle entre le GPRA en temps de guerre et l’Algérie d’aujourd’hui, ouvrant ainsi la voie à la prise du pouvoir par une caste militaire sous influence des déserteurs de l’armée française. Le GPRA connut deux réformes, en 1960 et 1961, les changements ministériels reflétant en partie les évolutions du pouvoir au sein du FLN. Telles sont les pages de l’histoire du GPRA, tissées dans la trame des rêves d’indépendance et des tumultes de la guerre.

Le premier gouvernement (19 septembre 1958 – 18 janvier 1960) était composé de :

Président du GPRA : Ferhat Abbas
Vice-président, Ministre des forces armées : Krim Belkacem
Vice-président, Ministre d’État : Ahmed Ben Bella (en prison)
Ministre d’État : Hocine Aït Ahmed (en prison)
Ministre d’État : Mohamed Boudiaf (en prison)
Ministre d’État : Mohamed Khider (en prison)
Ministre d’État : Rabah Bitat (en prison)
Ministre des Affaires extérieures : Mohamed Lamine Debaghine (démissionne le 15/3/59)
Ministre de l’Armement et du Ravitaillement : Mahmoud Cherif
Ministre de l’Intérieur : Lakhdar Bentobal
Ministre des Liaisons générales et Communications : Abdelhafid Boussouf
Ministre des Affaires nord-africaines : Abdelhamid Mehri
Ministre des Affaires économiques et des Finances : Ahmed Francis
Ministre de l’Information : M’Hamed Yazid
Ministre des Affaires sociales : Benyoucef Benkhedda
Ministre des Affaires culturelles : Ahmed Taoufik El Madani
Secrétaire d’État : Lamine Khene
Secrétaire d’État : Omar Oussedik
Secrétaire d’État : Mostefa Stambouli

65 ans après, l’Algérie est toujours en quête de la construction de son État-Nation, une noble aspiration entravée par les mains d’une caste militariste qui a confisqué le pouvoir.

Le rêve d’une Algérie indépendante, forgée par le sacrifice de tant de vies au cours de la Guerre d’Algérie pour l’Indépendance, perdure. Cependant, le chemin vers un État-Nation démocratique, égalitaire et prospère demeure sinueux. L’espoir qui a animé le Gouvernement Provisoire de la République Algérienne (GPRA) il y a 65 ans, lorsqu’il a été créé en exil, n’a jamais cessé d’animer le peuple algérien.

Pourtant, malgré les espoirs suscités par l’indépendance en 1962, l’Algérie a été confrontée à des défis constants. Au lieu de réaliser le rêve d’une nation souveraine, l’Algérie a été prise dans les méandres d’une caste militaire qui a maintenu un contrôle ferme sur le pouvoir politique et économique du pays. Cette emprise a entravé le développement de véritables institutions démocratiques et a maintenu une opacité politique qui a empêché le peuple de participer pleinement à la construction de son propre avenir.

L’économie algérienne a été marquée par une dépendance persistante aux hydrocarbures, ce qui a rendu le pays vulnérable aux fluctuations des prix du pétrole et du gaz. Le chômage, en particulier parmi les jeunes, reste un défi majeur, tandis que la corruption et l’injustice sociale continuent d’entraver le progrès.

Malgré ces défis, l’Algérie continue de voir émerger une société civile dynamique, des voix courageuses qui appellent à la réforme et à la démocratie. Les manifestations de 2019, connues sous le nom de Hirak, ont démontré la détermination du peuple algérien à revendiquer son droit à une gouvernance transparente et à un avenir meilleur.

Alors que l’Algérie commémore le 65e anniversaire de la naissance du GPRA, il est temps de réfléchir aux enseignements tirés de cette époque et d’envisager un avenir où la volonté du peuple puisse finalement prévaloir. L’histoire de l’Algérie est riche en résilience et en lutte pour la liberté. Il est peut-être temps que cette histoire soit écrite avec les aspirations du peuple algérien au cœur, afin de construire enfin un État-Nation qui reflète les rêves de ceux qui ont tant sacrifié pour l’indépendance.

Khaled Boulaziz

(*) Article dédié à ceux qui ont rêvé et combattu avec une ferveur infinie, pour que les dirigeants de l’Algérie indépendante incarnent la grandeur du premier GPRA, et tout particulièrement à mon défunt père, Abdelkader Boulaziz.

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